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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/177

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JEAN MORÉAS

« Je n’ai jamais rien fait qui fût indigne d’un poète ! »

Cette phrase que Jean Moréas prononça un jour devant moi éclaire toute sa vie et la rend intelligible à ceux qui auraient pu le mal juger d’après la tenue extérieure et les propos quotidiens du poète. Moréas était par sa race et ses goûts un aristocrate. C’était, comme l’a fort bien dit Barrès, un gentilhomme du Péloponèse. Et ses origines expliquent chez lui un certain débraillé de manières, une jactance narquoise, et cet air conquérant avec lequel il retroussait ses moustaches ou ajustait son monocle. Ne dit-on pas en Angleterre qu’un homme…

Trop de gens se sont arrêtés on même rebutés aux apparences que Moréas se plaisait à offrir à un public tour à tour trop facile ou trop sévère. C’était, au fond, la nature la plus noble, la plus spontanée, la plus délicate du monde. Par excès de sensibilité, il s’imposait un masque qui empêchât le vulgaire de trop vite connaître ses véritables traits. C’est miracle qu’il consentît