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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/272

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mire dans les flots, avec sa grande cathédrale, la grande, la sainte Cologne. »

Henri Heine ! tu caressas peut-être un vieux chien galeux, un jour de pluie et de suie, dans Cologne, et tu pleuras sans savoir pourquoi, et peut-être as-tu ri comme moi en voyant chez le confiseur du coin Hansl et Grettl ouvrir aux saucisses en sucre leurs jolies bouches roses.

À toi je te dirai tout bas le secret de mes larmes et de mon rire plus douloureux que les larmes. Je pleurais, ce jour-là, en pensant à la bien-aimée que j’avais laissée dans le pays de France. Elle a les yeux verts comme la mer et les cheveux d’or sombre. Et je riais parce qu’on a envie de rire quand on souffre trop.

Henri Heine, frère des poètes désolés, j’ai récité toute cette journée, sous la pluie et dans le bruit des cloches, en errant dans la grande, la sainte Cologne, ces vers auxquels ton frère en douleur, Schumann, a donné l’âme d’une musique ondoyante et fuyante comme le Rhin :

Ich weiss nicht was soll es bedeuten
Dass ich so traurig bin ;
Ein Mährchen aus alten Zeiten
Das kommt mir nicht aus dem Sinn.