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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/44

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l’aisselle leur fusil incliné[1] vers cette terre où ils te menaient à jamais dormir,

Tommy Atkins, ô Tommy Atkins !

III

De rares passants rasant les murs que brodait une ombre mince et violette saluaient la dépouille selon la douce coutume de France. Mais leur pensée était ailleurs : commerce, industrie, affaires. Puis ils pensaient peut-être à leurs propres morts. Moi seul, étant un poète à qui Dieu a départi, comme à tous les poètes, d’assumer la douleur d’autrui, j’ai senti sous mes paupières crever des larmes, toi que je n’ai jamais connu,

Tommy Atkins, ô Tommy Atkins !

IV

Aucune donneuse de baisers ne suivait ton cercueil, ni la mère dont le corps s’entr’ouvrit dans la douleur, il y a une vingtaine de printemps, pour te consacrer à la lumière, ni la sœur dont les paroles, lorsque tu te sentais malheureux, étaient pour toi une bénédiction, ni l’amante qui te livra, une nuit que toutes les

  1. Variante : qu’ils inclinaient. Au bas de la strophe suivante, j’ai cru devoir restituer la ligne oubliée du refrain (Note d’Albert Mockel)