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Page:Stuart Merrill - Prose et vers (1925).pdf/55

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la neige ; puis, grave, elle les tend vers le ciel comme pour emplir leurs corolles de la dernière lumière du crépuscule.

Et lorsque, fantôme elle-même, elle a les bras lourds de ces fleurs qui ne furent jamais, elle va vers les boulingrins où frémit l’éternelle jeunesse des statues et vers les bassins où s’est figé l’élan désespéré des monstres ; mais aux paroles d’incantation qu’elle leur souffle en tressant des guirlandes de rêves, les images restent sourdes ; et la reine retourne, pleurant, vers l’ombre d’où elle est issue.

Ce que voyant, le roi qui se souvient que cette reine fut son âme, essaie de comprendre le mystère de son passé ; mais il ne sait plus même penser, et, s’agenouillant dans la neige devant les dieux et les monstres, il se prend à murmurer, à la tombée des ténèbres, des prières de petit enfant qui aurait peur. Là-bas meurt une fanfare lointaine comme un souvenir de batailles livrées en une autre vie…

HÉCATOMBES

I

Du haut des degrés d’or du trône, le roi dévastateur de ces siècles étendit sur la horde des captifs aux fronts cerclés de couronnes de fer le glaive fulgurant de la Loi.