Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/72

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j’ai lancé mon coup d’autant plus fort, qu’à dessein j’ai mal visé la bestiole. Je voudrais qu’elle disparût et n’en pas être cause. Et, maintenant, je lève la main ; je la rends assez lourde pour briser une noix : mais je ne la fais pas tomber. La mouche continue de tourner autour de la lampe, et de vrombir, dans ce rythme insensé qui offre au regard la figure même du vertige.

C’est une mouche immonde de l’arrière saison, vieillie dans la corruption et l’ordure. Elle a la couleur des excréments : farcie de vermine, chaque contact de son corps doit engendrer la vermine ; ses paires de pattes, ses ailes, chaque vibration de cette immondice en mouvement semble faire les semailles de la vermine. Lourde et engourdie, elle cause encore plus de dégoût. Elle se chauffe au soleil