Page:Suarès - Tolstoï.djvu/111

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


XIV
GLOIRE DE LA DOUCEUR


Vous voyez quel est cet homme, et quel héros. Quoi de plus beau que ce héros s’arrachant à lui-même, et se tournant en apôtre ? — C’est à la gloire de la douceur.

Vous avez senti sa violence ; elle ne périra qu’avec lui ; il le sait bien ; et il la fait servir à l’évangile de la doctrine la plus douce. Les grands violents sont doux. C’est ce qui les distingue des autres. Les hommes, entraînés par leurs appétits, inclinent à la violence ; et s’ils craignent de s’y livrer, s’ils n’ont pas la force de braver cette crainte, ils honorent en autrui cette violence, même s’ils la détestent, même si elle leur nuit. Car ils ont la superstition maladive de la force. Telles sont toutes les femmes, et presque tous les hommes aussi. Ils adorent dans la violence la force qu’ils n’ont pas de repousser la violence ; et s’ils l’avaient, en effet, à leur tour ils seraient violents. Ils exaltent ainsi dans les autres l’envie de leurs propres crimes ; on les dirait presque fiers de cette force qui les décime ; et peut-être croient-ils