Page:Suarès - Tolstoï.djvu/21

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où l’homme se ruine, n’y sont pas méconnues ; mais il y semble aller de soi, selon l’Évangile, de les vaincre. Tolstoï donne une impression pareille ; il propose à l’homme une vie qui ne paraît ardue que si, dit-il, l’on n’a pas ouvert les yeux sur l’horreur et l’absurdité de la vie du monde, son contraire. Comme dans l’Évangile, et dans le même esprit, Tolstoï montre au soir de chaque journée pure, le seuil ouvert de la Maison du Père ; et ce n’est point par parabole qu’il fait voir tous les hommes assis autour de la table fraternelle, en frères également aimés, s’ils se portent un égal amour, et pour qui le pain blanc et le sel sont préparés.

L’Évangile a les couleurs de l’Orient. Il est naturel que Tolstoï, oriental comme un poète de la Bible, ait plus que personne le ton et le goût de l’Évangile. Mais, au lieu de l’horizon étroit de la Palestine, il a l’imagination des espaces sans borne de la Russie. Si donc il interprète trop à sa guise le texte saint, il en a le sens par divination. Les grandes règles qu’il donne ont le caractère de perfection, à la fois voisine et inaccessible, qu’on remarque aux préceptes de Jésus-Christ. Leur