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d’autre motif. Et, sans doute, si on prend cet arrêt de lui, comme on ferait d’un autre homme, il semble plein d’un orgueil intolérable : pourquoi l’intelligence de cet homme se donne-t-elle pour la mesure de toute intelligence ? — Un tel excès du sentiment propre serait sans excuse. Quoique, du reste, en l’occasion, un Tolstoï fût fondé à prendre en parfait mépris tous les auteurs, moins deux, et les œuvres qu’il jette au néant[1]. Mais il en a une raison, qui le dispense de toute autre. Il mesure les objets humains sur le rapport qu’ils ont à une quantité divine, — qui est la vérité. Et l’instrument de la mesure, cette intelligence, qui ravale à néant ce qui lui échappe, n’est pas, pour Tolstoï, l’esprit de Tolstoï même : mais, seulement, la faculté mise en tout homme d’atteindre cette divine réalité, et de la reconnaître.


VII


SUR LES PORTRAITS DE TOLSTOÏ


Tolstoï est le centre de chacun de ses grands ouvrages. Il en fait l’unité, que l’esprit léger ne leur

  1. Il n’est question, on l’a compris, que des contemporains, — de Wagner et d’Ibsen, pour les appeler par leurs noms.