Page:Suarès - Tolstoï.djvu/61

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chercher si la guerre est juste, — ou non si elle est nécessaire. Il est trop aisé de répondre à des questions où l’on fait argument de la proposition même. Une certaine manière de poser les problèmes, les résout. Quant au juste, il ne le sera jamais, de s’entre-tuer par myriades, aveuglément, et de voler le bien d’autrui, en laissant derrière soi des amas de cadavres. Il n’est pas évident, non plus, qu’il y ait avantage, pour les hommes, de se tuer par monceaux, de promener la mort et l’incendie dans les champs et par les villes. Aussi, n’est-ce pas la question. Mais elle est de savoir si la guerre est dans la nature de l’homme à l’égal de l’envie, de la haine ou de l’avarice ; et si, quand il la fait, il obéit à son instinct, comme quand il fait son pain, ou l’amour, — ou comme lorsqu’il se lance sur la mer, voyage par le monde, et accomplit ses autres travaux.

Tolstoï ne pourra, lui-même, nier que les peuples font la guerre en raison de leur force. Quand ils ne la font plus, ils la subissent. Ils cèdent, — et Tolstoï le trouve bon. Il oublie de peser la rançon de cette bonté précaire, à quel prix elle s’achète. Rome conquérante est terrible ;