Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/66

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l’étrange confiance que la bienfaisance inépuisable et éclairée de cette âme si belle avait donnée à nos montagnards, que si quelquefois je leur représentais la dangereuse témérité de leurs chasses périlleuses, en leur rappelant quel serait le triste avenir de leur famille s’ils venaient à périr, ils me répondaient : Mon père, l’Ange Marie y pourvoira ! En un mot, cette dame était devenue la Providence de ce village, et l’on y comptait comme sur celle de Dieu. Au bout d’un an, cette personne si aimée, si bénie, tomba gravement malade ; à cette nouvelle, je ne vous dirai pas, monsieur, les craintes, le désespoir de nos paysans, les prières, les ex-voto qu’ils firent pour elle, la désolation qui régna dans ce village.

Craignant de compromettre la rigoureuse sévérité de mon caractère, bien que le comte fût venu presque chaque jour me voir, je n’étais jamais allé chez lui ; mais lorsque cette dame fut très-malade, elle me demanda, et le comte vint me supplier de me rendre auprès d’elle : je ne pus m’en dispenser. Je la trouvai presque mourante…

Ce fut un moment terrible ; jamais sa piété ne se révéla plus fervente et plus profonde à mon âme attendrie. Je la consolai, je l’exhortai ;