Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/70

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une sorte d’ineffable indulgence qui s’étendait à tous. Si le comte, avec sa parole souvent acerbe et mordante, attaquait quelque caractère ou quelque fait historique ou contemporain… elle cherchait toujours à trouver dans le caractère le plus noir, dans le fait le plus triste, un bon instinct ou un sentiment généreux qui les excusât un peu… Alors les larmes me venaient aux yeux, en songeant que c’était sans doute un cruel retour sur elle-même, un remords incessant, qui rendait cette pauvre femme si bienveillante à tous, comme si elle eût, hélas ! senti qu’étant bien coupable elle-même, il ne lui était permis d’accuser personne…

Et le comte, monsieur, si vous saviez avec quelle profonde et presque respectueuse tendresse il lui parlait ! comme il l’écoutait ! avec quelle délicate fierté il savait apprécier et faire ressortir tout ce qu’il y avait de noble et de grand dans l’esprit et dans le cœur de celle qu’il aimait tant ! combien son visage devenait radieux en la contemplant ! Que de fois je l’ai vu la regarder ainsi longtemps en silence, et puis tout à coup, comme si les mots lui eussent manqué pour peindre ce qu’il ressentait, lever les yeux au ciel en joignant les mains