Page:Sue - Arthur, T2, 1845.djvu/206

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la plus souveraine, et qui peut-être à cette heure tiendrait ma main dans la sienne, et me dirait d’une voix enchanteresse et les yeux humides de tendresse : — À vous mon âme, à vous ma vie !…

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En vérité, cela était affreux, et pourtant, par une bizarrerie fatale de mon malheureux esprit, je trouvais une sorte de jouissance aussi amère qu’inexplicable, dans le contraste de ce présent si sombre, si abject, et de ce passé si éblouissant.

C’était donc un soir ; cinq ou six jours après le départ de Marguerite, je me trouvais alors dans le douloureux paroxysme de mes regrets. La nuit était sombre, la pluie tombait, fine et froide ; je m’enveloppai dans un manteau, et je sortis.

Je ne m’étais jamais figuré l’effroyable tristesse des rues du Paris à cette heure ; rien de plus lugubre que la pâle réflexion des réverbères sur ces pavés couverts d’une boue noire et fétide, et dans l’eau stagnante des ruisseaux. En marchant ainsi au hasard, je pensais souvent à l’épouvantable sort d’un homme sans asile, sans pain, sans ressource, et errant ainsi que j’errais.