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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/130

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conspiration militaire contre les Russes ; il échappe, votre père le cache chez lui, cela se découvre ; pendant la nuit du lendemain, un peloton de Cosaques, commandé par un officier et suivi d’une voiture de poste, arrive à notre porte ; on surprend le général pendant son sommeil, et on l’enlève.

— Mon Dieu ! que voulait-on lui faire ?

— Le conduire hors de Russie, avec défense d’y jamais rentrer, et menacé d’une prison éternelle s’il y revenait ; voilà son dernier mot : « Dagobert, je te confie ma femme et mon enfant ; » car votre mère devait dans quelques mois vous mettre au monde ; eh bien ! malgré cela, on l’exila en Sibérie ; c’était une occasion de s’en défaire : elle faisait trop de bien à Varsovie ; on la craignait. Non content de l’exiler, on confisque tous ses biens ; pour seule grâce, elle avait obtenu que je l’accompagnerais, et sans Jovial, que le général m’avait fait garder, elle aurait été forcée de faire la route à pied. C’est ainsi, elle à cheval, et moi la conduisant comme je vous conduis, mes enfants, que nous sommes arrivés dans un misérable village, où trois mois après vous êtes nées, pauvres petites !

— Et notre père ?

— Impossible à lui de rentrer en Russie… impossible à votre mère de songer à fuir avec