Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/142

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et qu’ils continuent de ravager sans pitié ; car ici, guerre anglaise, c’est dire trahison, pillage et massacre. Ce matin, après une marche pénible, au milieu des rochers et des montagnes, nous apprenons par nos éclaireurs que des renforts arrivent à l’ennemi, et qu’il s’apprête à reprendre l’offensive ; il n’était plus qu’à quelques lieues, un engagement devenait inévitable ; mon vieil ami, le prince indien, père de mon sauveur, ne demandait qu’à marcher au feu. L’affaire a commencé sur les trois heures ; elle a été sanglante, acharnée. Voyant chez les nôtres un moment d’indécision, car ils étaient bien inférieurs en nombre, et les renforts des Anglais se composaient de troupes fraîches, j’ai chargé à la tête de notre petite réserve de cavalerie.

« Le vieux prince était au centre, se battant comme il se bat, intrépidement ; son fils Djalma, âgé de dix-huit ans à peine, brave comme son père, ne me quittait pas ; au moment le plus chaud de l’engagement, mon cheval est tué, roule avec moi dans une ravine que je côtoyais, et je me trouve si sottement engagé sous lui qu’un moment je me suis cru la cuisse cassée… »

— Pauvre père, dit Blanche.

— Heureusement, cette fois, il ne lui sera