Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/148

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vant la bouche d’un canon…, dit Dagobert.

« Toi, reprit la jeune fille en reprenant la lecture, toi ma chère Éva, depuis les visites de cette femme jeune et belle, que ta mère… prétendait avoir aussi vue chez sa mère… quarante ans auparavant. »

Les orphelines regardèrent le soldat avec étonnement.

— Votre mère… ne m’avait jamais parlé de cela… ni le général non plus… mes enfants ; ça me semble aussi singulier qu’à vous.

Rose reprit avec une émotion et une curiosité croissantes :

« Après tout, ma chère Éva, souvent les choses en apparence très-extraordinaires s’expliquent par un hasard, une ressemblance ou un jeu de la nature. Le merveilleux n’étant toujours qu’une illusion d’optique, ou le résultat d’une imagination déjà frappée, il arrive un moment où ce qui semblait surhumain ou surnaturel se trouve l’événement le plus humain et le plus naturel du monde ; aussi je ne doute pas que ce que nous appelions nos prodiges n’ait tôt ou tard ce dénoûment terre à terre. »

— Vous voyez, mes enfants, cela paraît d’abord merveilleux… et au fond… c’est tout simple… ce qui n’empêche pas que pendant longtemps on n’y comprend rien…