Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/202

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deux enfants, comme il les appelait, lui avaient adressé la parole sans qu’il leur répondît.

Blanche et Rose sentirent de grosses larmes mouiller leurs yeux ; croyant le soldat fâché, elles n’osèrent plus lui parler.

— Non… non… ça ne se peut pas… non ! disait le vétéran en appuyant sa main sur son front et en cherchant encore dans sa mémoire où il aurait pu placer des objets si précieux pour lui, ne voulant pas encore se résoudre à leur perte.

Un éclair de joie brilla dans ses yeux… il courut prendre sur une chaise la valise des orphelines, elle contenait un peu de linge, deux robes noires et une petite boîte de bois renfermant un mouchoir de soie qui avait appartenu à leur mère, deux boucles de cheveux, et un ruban noir qu’elle portait au cou. Le peu qu’elle possédait avait été saisi par le gouverneur russe par suite de la confiscation. Dagobert fouilla et refouilla tout… visita jusqu’aux derniers recoins de la valise… rien… rien…

Cette fois, complètement anéanti, il s’appuya sur la table. Cet homme si robuste, si énergique, se sentait faiblir… Son visage était à la fois brûlant et baigné d’une sueur froide… ses genoux tremblaient sous lui.