Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/233

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veux recommencer à m’attendrir avec ton air câlin ! mais j’ai pénétré tes secrets desseins… Tu n’es pas ce que tu parais être, et il pourrait bien y avoir une affaire d’État au fond de tout ceci, ajouta le magistrat d’un ton extrêmement diplomatique. Tous moyens sont bons pour les gens qui voudraient mettre l’Europe en feu.

— Je ne suis qu’un pauvre diable… M. le bourgmestre… Vous qui avez si bon cœur, ne soyez pas impitoyable !…

— Ah ! tu m’arraches mon bonnet !

— Mais vous, ajouta le soldat en se tournant vers Morok, vous qui êtes cause de tout… ayez pitié de moi… ne montrez pas de rancune… Vous qui êtes un saint homme, dites au moins un mot en ma faveur à M. le bourgmestre.

— Je lui ai dit… ce que je devais lui dire, répondit ironiquement Morok.

— Ah ! ah ! te voilà bien penaud à cette heure, vieux vagabond… Tu croyais m’abuser par tes jérémiades, reprit le bourgmestre en s’avançant vers Dagobert ; Dieu merci ! je ne suis plus ta dupe… Tu verras qu’il y a à Leipzig de bons cachots pour les agitateurs français et pour les coureuses d’aventures, car tes donzelles ne valent pas mieux que toi… Allons, ajouta-t-il d’un ton important en gonflant ses