Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/257

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contemplait de toute la hauteur de sa grande taille, et sur lequel il posait sa main d’un air si fier, si audacieux, si souverain.

Alors il ne souriait pas.

Son large front se plissait d’une manière formidable, son regard menaçait ; l’artiste qui aurait voulu peindre le démon de l’astuce et de l’orgueil, l’infernal génie d’une domination insatiable, n’aurait pu choisir un plus effrayant modèle.

Lorsque Rodin rentra, la figure de son maître avait repris son expression habituelle.

— C’est le facteur, dit Rodin en montrant les lettres qu’il tenait à la main, il n’y a rien de Dunkerque…

— Rien !… s’écria son maître.

Et sa douloureuse émotion contrastait singulièrement avec l’expression hautaine et implacable que son visage avait naguère.

— Rien ! aucune nouvelle de ma mère ! reprit-il ; encore trente-six heures d’inquiétude.

— Il me semble que si madame la princesse avait eu de mauvaises nouvelles à donner, elle eût écrit ; probablement le mieux continue…

— Vous avez sans doute raison, Rodin, mais il n’importe… je ne suis pas tranquille… Si demain je n’ai pas des nouvelles complètement