Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/396

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Paris pour chercher un nourrisson ; elle a été à l’hôtel de Saint-Dizier, pour voir madame Grivois, sa marraine… tu sais, la première femme de chambre de madame la princesse… Eh bien ! c’est elle, madame Grivois, qui lui a dit tout cela, et assurément elle doit être bien informée puisqu’elle est de la maison.

— Oui, encore une bonne pièce et une fine mouche que cette Grivois. Autrefois c’était la plus fière luronne, et maintenant elle fait comme sa maîtresse… la sainte nitouche… la dévote, car tel maître, tel valet ;… La princesse elle-même, qui, à cette heure, est si collet monté, elle allait joliment bien dans le temps… hein ?… il y a une quinzaine d’années, quelle gaillarde ! Te rappelles-tu ce beau colonel de hussards qui était en garnison à Abbeville ?… Tu sais bien, cet émigré qui avait servi en Russie, et à qui les Bourbons avaient donné un régiment à la restauration ?

— Oui, oui, je m’en souviens, mais tu es trop mauvaise langue.

— Ma foi, non, je dis la vérité, le colonel passait sa vie au château, et tout le monde disait qu’il était très bien avec la sainte princesse d’aujourd’hui… Ah ! c’était le bon temps alors. Tous les soirs fête ou spectacle au château. Quel boute-en-train que ce colonel !…