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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/449

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couché au pied de ce fauteuil, crurent que Dagobert y sommeillait ; elles s’avancèrent donc vers ce siége sur la pointe du pied.

À leur grand étonnement, elles virent Gabriel endormi. Interdites, elles s’arrêtèrent immobiles, n’osant ni reculer, ni avancer, de peur de l’éveiller.

Les longs cheveux blonds du missionnaire, n’étant plus mouillés, frisaient naturellement autour de son cou et de ses épaules ; la pâleur de son teint ressortait sur le pourpre foncé du damas qui recouvrait le dossier du fauteuil. Le beau visage de Gabriel exprimait alors une mélancolie amère, soit qu’il fût sous l’impression d’un songe pénible, soit qu’il eût l’habitude de cacher de douloureux ressentiments dont l’expression se révélait à son insu pendant son sommeil ; malgré cette apparence de tristesse navrante, ses traits conservaient leur caractère d’angélique douceur, d’un attrait inexprimable… car rien n’est plus touchant que la beauté qui souffre.

Les deux jeunes filles baissèrent les yeux, rougirent spontanément, et échangèrent un coup d’œil un peu inquiet, en se montrant du regard le missionnaire endormi.

— Il dort, ma sœur… dit Rose à voix basse.

— Tant mieux…, répondit Blanche aussi à