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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/511

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pour la couturière ça avait été des fêtes sans pareilles ; elle avait veillé bien des nuits, jeûné bien des jours pour pouvoir s’acheter un bonnet passable et un petit châle, afin de ne pas faire honte à Agricol et à sa mère ; ces cinq ou six promenades faites au bras de celui qu’elle idolâtrait en secret, avaient été les seuls jours de bonheur qu’elle eût jamais connus.

Lors de leur dernière promenade, un homme brutal et grossier l’avait coudoyée si rudement que la pauvre fille n’avait pu retenir un léger cri de douleur… auquel cri cet homme avait répondu : « Tant pis pour toi, mauvaise bossue ! »

Agricol était, comme son père, doué de cette bonté patiente que la force et le courage donnent aux cœurs généreux ; mais il était d’une grande violence lorsqu’il s’agissait de châtier une lâche insulte. Irrité de la méchanceté, de la grossièreté de cet homme, Agricol avait quitté le bras de sa mère pour appliquer à ce brutal, qui était de son âge, de sa taille et de sa force, les deux meilleurs soufflets que jamais large et robuste main de forgeron ait appliqués sur une face humaine ; le brutal voulut riposter, Agricol redoubla la correction à la grande satisfaction de la foule ; et l’autre disparut au milieu des huées.

C’est cette aventure que la pauvre Mayeux