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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/512

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venait de rappeler en disant qu’elle ne voulait plus sortir avec Agricol afin de lui épargner toute querelle à son sujet.

On conçoit le regret du forgeron d’avoir involontairement réveillé le souvenir de cette pénible circonstance… hélas ! plus pénible encore pour la Mayeux que ne pouvait le supposer Agricol, car elle l’aimait passionnément… et elle avait été cause de cette querelle par une infirmité ridicule.

Agricol, malgré sa force et sa résolution, avait une sensibilité d’enfant ; en songeant à ce que ce souvenir devait avoir de douloureux pour la jeune fille, une grosse larme lui vint aux yeux, et lui tendant fraternellement les bras, il lui dit :

— Pardonne-moi ma sottise, viens m’embrasser…

Et il appuya deux bons baisers sur les joues pâles et amaigries de la Mayeux.

À cette cordiale étreinte, les lèvres de la jeune fille blanchirent et son pauvre cœur battit si violemment qu’elle fut obligée de s’appuyer à l’angle de la table.

— Voyons, tu me pardonnes, n’est-ce pas ? lui dit Agricol.

— Oui, oui, dit-elle en cherchant à vaincre son émotion ; pardon, à mon tour, de ma fai-