Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/548

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prendra ce que ta position a de cruel, et elle fera avec joie, avec bonheur, avec reconnaissance, ce que je ferais… si, hélas ! je pouvais autre chose que me dévouer sans utilité…

Malgré elle, la Mayeux prononça ces derniers mots avec une expression si navrante ; il y avait quelque chose de si poignant dans la comparaison que cette infortunée, obscure et dédaignée, misérable et infirme, faisait d’elle-même avec Adrienne de Cardoville, ce type resplendissant de jeunesse, de beauté, d’opulence, qu’Agricol fut ému jusqu’aux larmes ; tendant une de ses mains à la Mayeux, il lui dit d’une voix attendrie :

— Combien tu es bonne !… qu’il y a en toi de noblesse, de bon sens, de délicatesse !…

— Malheureusement je ne peux que cela… conseiller…

— Et tes conseils seront suivis… ma bonne Mayeux ; ils sont ceux de l’âme la plus élevée que je connaisse… Et puis, tu m’as rassuré sur cette démarche en me persuadant que le cœur de mademoiselle de Cardoville… valait le tien.

À ce rapprochement naïf et sincère, la Mayeux oublia presque tout ce qu’elle venait de souffrir, tant son émotion fut douce, consolante…