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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/568

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saillit et rougit si visiblement que le soldat lui dit :

— Si tu ne dois ou si tu ne peux pas répondre à ma demande… suppose que je n’ai rien dit…

— Je n’ai rien à vous cacher ni à mon frère…, dit le missionnaire d’une voix altérée. Seulement, j’aurai de la peine à vous faire comprendre… ce que je ne comprends pas moi-même…

— Comment cela ? dit Agricol surpris.

— Sans doute, dit Gabriel en rougissant, j’aurai été dupe d’un mensonge de mes sens trompés :… dans ce moment suprême où j’attendais la mort avec résignation… mon esprit, affaibli malgré moi, aura été trompé par une apparence… et ce qui, à cette heure encore, me paraît inexplicable, m’aurait été dévoilé plus tard ;… nécessairement j’aurais su quelle était cette femme étrange…

Dagobert, en entendant le missionnaire, restait stupéfait, car, lui aussi, cherchait vainement à s’expliquer le secours inattendu qui l’avait fait sortir de la prison de Leipzig, ainsi que les orphelines.

— De quelle femme parles-tu ? demanda le forgeron au missionnaire.

— De celle qui m’a sauvé.

— C’est une femme qui t’a sauvé des mains des sauvages ? dit Dagobert.