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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/60

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grand vent faisait vaciller la lumière des lanternes à la clarté desquelles on recevait ces nouveaux hôtes ; le signalement donné à Morok était si exact, qu’il ne pouvait s’y tromper.

Sûr de sa proie, il ferma la fenêtre.

Après avoir encore réfléchi un quart d’heure, sans doute pour bien coordonner ses projets, il se pencha au-dessus de la trappe où était placée l’échelle qui servait d’escalier, et appela :

— Goliath !

— Maître ? répondit une voix rauque.

— Viens ici…

— Me voilà… Je viens de la boucherie, j’apporte la viande.

Les montants de l’échelle tremblèrent, et bientôt une tête énorme apparut au niveau du plancher.

Goliath, le bien nommé (il avait plus de six pieds et une carrure d’Hercule), était hideux ; ses yeux louches se renfonçaient sous un front bas et saillant ; sa chevelure et sa barbe fauve, épaisse et drue comme du crin, donnaient à ses traits un caractère bestialement sauvage ; entre ses larges mâchoires, armées de dents ressemblant à des crocs, il tenait par un coin un morceau de bœuf cru pesant dix ou douze livres, trouvant sans doute plus commode de porter