Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/173

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cepter, au nom de cette supériorité, une vie et des habitudes uniques dans le monde…

— Je n’ai jamais eu ce stupide orgueil… monsieur, vous le savez bien…, dit Adrienne en regardant le docteur avec un effroi croissant.

— Alors, ma pauvre enfant, à quoi attribuer votre manière de vivre si étrange, si inexplicable ? Pourrez-vous jamais vous persuader à vous-même qu’elle est sensée ? Ah ! mon enfant, prenez garde… Vous en êtes encore à des originalités charmantes… à des excentricités poétiques… à des rêveries douces et vagues ;… mais la pente est irrésistible, fatale… Prenez garde !… prenez garde !… la partie saine, gracieuse, spirituelle de votre intelligence ayant encore le dessus… imprime encore son cachet à vos étrangetés… Mais vous ne savez pas, voyez-vous… avec quelle violence effrayante la partie insensée se développe et étouffe l’autre… à un moment donné. Alors, ce ne sont plus des bizarreries gracieuses comme les vôtres… ce sont des insanités ridicules, sordides, hideuses.

— Ah !… j’ai peur… dit la malheureuse enfant en passant ses mains tremblantes sur son front brûlant.

— Alors…, continua M. Baleinier d’une voix altérée, alors les dernières lueurs de l’intelligence s’éteignent ; alors… la folie… il faut