Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/125

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gny. Aussi, lorsque Agricol, emporté par l’indignation, avait reproché à ce dernier ses machinations infâmes, celui-ci avait baissé la tête et modestement répondu :

— Nous devons pardonner les injures et les offrir au Seigneur comme preuve de notre humilité.

Dagobert, étourdi, écrasé par tout ce qu’il venait d’apprendre, sentait presque sa raison se troubler ; après tant d’angoisses, ses forces lui manquaient devant ce nouveau et terrible coup.

Les paroles justes et sensées d’Agricol, rapprochés de certains passages du testament, éclairèrent tout à coup Gabriel sur le but que s’était proposé le père d’Aigrigny en se chargeant d’abord de son éducation et en l’attirant ensuite dans la compagnie de Jésus. Pour la première fois de sa vie, Gabriel put contempler d’un coup d’œil tous les ressorts de la ténébreuse intrigue dont il était victime ; alors l’indignation, le désespoir surmontant sa timidité habituelle, le missionnaire, l’œil éclatant, les joues enflammées d’un noble courroux, s’écria en s’adressant au père d’Aigrigny :

— Ainsi, mon père, lorsque vous m’avez placé dans l’un de vos collèges, ce n’était pas par intérêt ou par commisération, c’était seulement dans l’espoir de m’amener un jour à renoncer