Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/23

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martyr, et nous nous enorgueillissons à juste titre de vous compter parmi nous. Ce rapide exposé du passé était nécessaire, mon cher fils, pour arriver à ce qui suit ; car il s’agit, si la chose était possible… de resserrer davantage encore les liens qui vous attachent à nous. Écoutez-moi donc bien, mon cher fils, ceci est confidentiel et d’une haute importance, non seulement pour vous, mais encore pour notre compagnie…

— Alors… mon père…, s’écria vivement Gabriel en interrompant le père d’Aigrigny, je ne puis pas… je ne dois pas vous entendre !

Et le jeune prêtre devint pâle ; on vit, à l’altération de ses traits, qu’un violent combat se livrait en lui ; mais reprenant bientôt sa résolution première, il releva le front, et, jetant un regard assuré sur le père d’Aigrigny et sur Rodin, qui se regardaient muets de surprise, il reprit :

— Je vous le répète, mon père, s’il s’agit de choses confidentielles sur la compagnie… il m’est impossible de vous entendre.

— En vérité, mon cher fils, vous me causez un étonnement profond. Qu’avez-vous ? mon Dieu !… Vos traits sont altérés, votre émotion est visible… Voyons… parlez… sans crainte…