Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/316

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des autres, rentre chaque soir dans son réduit, où il se permet alors d’élucubrer ses idées à lui ; un brave homme qui, de son grenier, assiste et prend même un peu de part au mouvement des esprits généreux qui marchent vers un but plus prochain peut-être qu’on ne le pense communément… Aussi, ma chère demoiselle, je vous le disais tout à l’heure : « Vous et moi nous tendons aux mêmes fins, vous sans y réfléchir et en continuant d’obéir à vos rares et divins instincts. » Aussi, croyez-moi, vivez, vivez, toujours belle, toujours libre, toujours heureuse ! c’est votre mission ; elle est plus providentielle que vous ne le pensez ; oui, continuez à vous entourer de toutes les merveilles du luxe et des arts ; raffinez encore vos sens, épurez encore vos goûts par le choix exquis de vos jouissances ; dominez par l’esprit, par la grâce, par la pureté, cet imbécile et laid troupeau d’hommes, qui, dès demain, vous voyant seule et libre, va vous entourer ; ils vous croiront une proie facile, dévolue à leur cupidité, à leur égoïsme, à leur sotte fatuité. Raillez, stigmatisez ces prétentions niaises et sordides ; soyez reine de ce monde et digne d’être respectée comme une reine… Aimez… brillez… jouissez… c’est votre rôle ici-bas ; n’en doutez pas ! toutes ces fleurs