Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/42

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rante : le vœu de renoncer à l’exercice de ma volonté…

— Rappelez-vous, mon cher fils, reprit le père d’Aigrigny, pâle et torturé par des angoisses croissantes, rappelez-vous que la veille du jour fixé pour la prononciation de vos vœux, je vous ai offert, selon la règle de notre compagnie, de renoncer à être des nôtres, vous laissant complètement libre, car nous n’acceptons que les vocations volontaires.

— Il est vrai, mon père, répondit Gabriel avec une douloureuse amertume, lorsque, épuisé, brisé par trois mois de solitude et d’épreuves, j’étais anéanti… incapable de faire un mouvement, vous avez ouvert la porte de ma cellule… en me disant : « Si vous le voulez, levez-vous… marchez… vous êtes libre… » Hélas ! les forces me manquaient ; le seul désir de mon âme inerte, et depuis si longtemps paralysée, c’était le repos du sépulcre… aussi je prononçai des vœux irrévocables, et je retombai entre vos mains, comme un cadavre

— Et jusqu’à présent, mon cher fils, vous n’aviez jamais failli à cette obéissance de cadavre… ainsi que l’a dit, en effet, notre glorieux fondateur… parce que plus cette obéissance est absolue, plus elle est méritoire…

Après un moment de silence, Gabriel reprit :