Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/435

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— Il est vrai, j’ai fait aussi cette réflexion. Et cependant la rencontre de ces deux hommes m’a paru si menaçante pour vous, mademoiselle, que je suis revenue dans une grande épouvante.

Les caractères d’une extrême loyauté se résignent difficilement à croire aux trahisons ; plus elles sont infâmes, plus ils en doutent ; le caractère d’Adrienne était de ce nombre, et, de plus, une des qualités de son esprit était la rectitude : aussi, bien que très-impressionnée par le récit de la Mayeux, elle reprit :

— Voyons, mon amie, ne nous effrayons pas à tort, ne nous hâtons pas trop de croire au mal… Cherchons toutes deux à nous éclairer par le raisonnement : rappelons les faits. M. Rodin m’a ouvert les portes de la maison de M. Baleinier ; il a devant moi porté plainte contre l’abbé d’Aigrigny ; il a, par ses menaces, obligé la supérieure du couvent à lui rendre les filles du maréchal Simon ; il est parvenu à découvrir la retraite du prince Djalma ; il a exécuté mes intentions au sujet de mon jeune parent ; hier encore il m’a donné les plus utiles conseils… Tout ceci est bien réel, n’est-ce pas ?

— Sans doute, mademoiselle.

— Maintenant, que M. Rodin, en mettant les