Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/357

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plus haute importance, écoutez-moi bien attentivement.

Rodin, sans se retourner, dit d’un ton amèrement courroucé qui trahissait une souffrance réelle :

— Ils veulent ma mort… j’ai la poitrine en feu… la tête brisée… et ils sont sans pitié… Oh ! je souffre comme un damné…

— Déjà…, dit tout bas le Romain en souriant malicieusement de ce sarcasme.

Puis il reprit tout haut :

— Permettez-moi d’insister, mon très-cher père… Faites un petit effort pour m’écouter, vous ne le regretterez pas.

Rodin, toujours étendu sur son lit, leva au ciel sans mot dire, mais d’un geste désespéré, ses deux mains jointes et crispées sur son mouchoir à tabac, puis ses bras retombèrent affaissés le long de son corps.

Le cardinal haussa légèrement les épaules et accentua lentement les paroles suivantes afin que Rodin n’en perdît aucune :

— Mon cher père, la Providence a voulu que, pendant votre accès de délire, vous fissiez à votre insu des révélations très-importantes.

Et le prélat attendit avec une inquiète curiosité le résultat du pieux guet-apens qu’il tendait à l’esprit affaibli du jésuite.