Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/388

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— Malheureux… que faites-vous ? c’est la mort ! s’écria le père d’Aigrigny en se précipitant vers Rodin pour le forcer à se recoucher.

Mais celui-ci, étendant un de ses bras de squelette, dur comme du fer, repoussa au loin le père d’Aigrigny avec une vigueur inconcevable si l’on songe à l’état d’épuisement où il était depuis longtemps.

— Il a la force d’un épileptique pendant son accès !… dit au prélat le père d’Aigrigny en se raffermissant sur ses jambes.

Rodin, d’un pas grave, se dirigea vers le bureau où se trouvait ce qui était journellement nécessaire au docteur Baleinier pour formuler ses ordonnances ; puis, s’asseyant devant cette table, le jésuite prit du papier, une plume et commença d’écrire d’une main ferme.

Ses mouvements calmes, lents et sûrs, avaient quelque chose de la mesure réfléchie que l’on remarque chez les somnambules.

Muets, immobiles, ne sachant s’ils rêvaient ou non, à la vue de ce prodige, le cardinal et le père d’Aigrigny restèrent béants devant l’incroyable sang-froid de Rodin, qui, demi-nu, écrivait avec une tranquillité parfaite.

Pourtant le père d’Aigrigny s’avança vers lui et lui dit :

— Mais, mon père… cela est insensé…