Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/502

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oui… madame… tenez… comme maintenant rien qu’en y pensant, à ce pauvre prince. Ah ! madame, ajouta Rose-Pompon, ses jolis yeux bleus baignés de pleurs, et avec une expression d’intérêt si sincère, qu’Adrienne fut profondément émue ; ah ! madame… vous avez l’air si doux, si bon, ne le rendez donc pas malheureux, aimez-le donc un peu, ce pauvre prince… Voyons, qu’est-ce que cela vous fait de l’aimer ?

Et Rose-Pompon, d’un geste sans doute trop familier, mais rempli de naïveté, prit avec effusion la main d’Adrienne, comme pour accentuer davantage sa prière.

Il avait fallu à mademoiselle de Cardoville un grand empire sur elle-même pour contenir, pour refouler l’élan de sa joie, qui, du cœur, lui montait aux lèvres ; pour arrêter le torrent de questions qu’elle brûlait d’adresser à Rose-Pompon, pour retenir enfin les douces larmes de bonheur qui depuis quelques instants tremblaient sous ses paupières ; et puis, chose bizarre ! lorsque Rose-Pompon lui avait pris la main, Adrienne, au lieu de la retirer, avait affectueusement serré celle de la grisette, puis, par un mouvement machinal, l’avait attirée près de la fenêtre, comme si elle eût voulu examiner plus attentivement