Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/473

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renversé en arrière, les mains étendues en avant, les yeux fixes, démesurément ouverts, cerclés de blanc… Adrienne, ne redoutant plus une amoureuse surprise, mais ressentant un indicible effroi, au lieu de fuir le prince, fit quelques pas vers lui et s’écria d’une voix altérée, en lui montrant du geste le kandjiar :

— Mon ami, comment êtes-vous ici ? Qu’avez-vous ?… pourquoi ce poignard ?

Djalma ne répondait pas…

Tout d’abord, la présence d’Adrienne lui avait semblé être une vision qu’il attribuait à l’égarement de son cerveau, déjà troublé, pensait-il, par l’effet du poison.

Mais lorsque la douce voix de la jeune fille eut frappé son oreille ;… mais lorsque son cœur eut tressailli à l’espèce de choc électrique qu’il ressentait toujours, dès que son regard rencontrait le regard de cette femme si ardemment aimée ;… mais lorsqu’il eut contemplé cet adorable visage, si rose, si frais, si reposé, malgré son expression de vive inquiétude… Djalma comprit qu’il n’était le jouet d’aucun rêve, et que mademoiselle de Cardoville était devant ses yeux…

Alors et à mesure qu’il se pénétrait pour ainsi dire de cette pensée, qu’Adrienne n’était pas morte, et quoiqu’il ne pût s’expliquer le