Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/202

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Desmarais avec un ébahissement sincère, — je me creuse en vain la tête à deviner où peuvent aboutir tes divagations… j’attends cette confidence dont l’attente me jette dans l’angoisse…

— Cette confidence… je vous la fais, ma mère.

— Comment ?… En me parlant de la prétendue égalité d’un avocat et d’un ouvrier ?

— Oui, maman… j’espérais être comprise de vous… — balbutie la jeune fille confuse, et d’autant plus embarrassée qu’elle voyait combien sa mère était éloignée de soupçonner la vérité. — Je vous en dis, ce me semble, assez pour…

— Charlotte… te fais-tu un jeu de mes inquiétudes ? — reprend madame Desmarais, avec un accent de tendre reproche. — Non, non, tu m’aimes trop pour cela… et cependant chacune de tes paroles est pour moi une énigme…

— Mon Dieu… maman… Quoi… vous ne devinez pas ?

— Que veux-tu que je devine ?…

Charlotte, de qui les yeux se remplissent de nouveau de larmes, est en proie à une violente lutte intérieure… mais reculant encore devant un aveu auquel, dans sa candeur, elle avait cru préparer madame Desmarais, elle demeure un moment silencieuse, puis, d’une voix timide :

— Maman, permets-moi d’en appeler une dernière fois à tes souvenirs… S’ils ne te mettent pas sur la voie… je te jure de te faire sans détour mes confidences…

Soudain une commotion sourde, prolongée, répétée d’écho en écho, fait bruire et trembler les vitres du salon.

— Quel est ce bruit ?… — s’écrie vivement madame Desmarais, en tressaillant et prêtant l’oreille au dehors, — écoute… Charlotte, écoute…

De nouvelles commotions plus distinctes que la première se précipitant coup sur coup, ébranlent de nouveau les vitres et jusqu’aux