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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/252

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ment dévoué au peuple, à la révolution, la vaillante part que tu as prise à l’attaque de la Bastille, ta glorieuse blessure, te le rendront plus favorable encore… Si, au contraire, ce que je ne puis croire, il ment à ses convictions apparentes… s’il est de ceux-là… et il en est beaucoup… que cette première et foudroyante victoire populaire consterne… il repoussera ou il éludera ta demande

— Le conseil de ta sœur est sage, — dit le vieillard. Mais Jean Lebrenn répondit :

— Il faudrait du moins que j’eusse prévenu mademoiselle Charlotte de ma démarche.

— Mon frère, il ne s’agit pas seulement ici de ton amour… mais de notre cause… mais d’une grave responsabilité qui pèse sur toi…

— Que veux-tu dire ?

— Tes amis, moins éclairés que toi, ont eu confiance en tes paroles lorsque tu leur as garanti la sincérité du dévouement de M. Desmarais à la cause populaire, n’est-ce pas ?… et ton affirmation a en partie décidé leur choix ?

— C’est vrai.

— Tu peux donc mettre les apparentes convictions de M. Desmarais à une épreuve décisive en lui demandant la main de sa fille…

— Évidemment, — dit le vieillard ; — s’il te la refuse…

— … C’est qu’il est avec nous des lèvres… et non du cœur, — ajoute Victoria. — Le refus de M. Desmarais est moralement impossible… sa fille t’a engagé sa foi… Quant à lui… ne l’ai-je pas entendu tout à l’heure s’écrier, s’adressant à notre père : — « Ah ! vous me faites pour la première fois connaître l’envie !… que n’ai-je un fils tel que le vôtre ! »

— Digne homme ! — dit madame Lebrenn attendrie, — combien ces paroles sont touchantes !…

— Si ces paroles sont aussi sincères que touchantes, — reprend Victoria, — M. Desmarais saisira cette occasion de voir entrer dans sa famille ce fils qu’il envie… en consentant au mariage de Jean,