Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/198

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de la prise de la Bastille, ce drôle de Lehiron a égorgillé ce bon M. de Flesselles. Ainsi, le matin du jour du massacre du champ de Mars, et sous le fabuleux prétexte qu’ils voulaient faire sauter au moyen d’un baril de poudre l’autel de la Patrie, mons Lehiron a fait mettre en pièces deux polissons qui s’étaient cachés sous l’estrade, afin de voir les jambes des estimables citoyennes sans-culottes qui viendraient signer la pétition relative à la déchéance de Louis XVI… et le soir, mon même drôle tirait en l’air un coup de pistolet sur le héros des deux mondes, lequel coup de pistolet a été le signal et le prétexte de la boucherie que vous savez. Lors des journées de septembre, voulant leur donner plus de saveur, mons Lehiron a coupé la tête à cette belle et jeune princesse de Lamballe, et s’est livré avec sa bande à d’abominables, à d’obscènes mutilations sur le cadavre de l’amie intime de Marie-Antoinette. Enfin, au 10 août, mon même féal et amé coquin a fait massacrer quelques soldats suisses prisonniers, le tout ad majorem Dei gloriam, et à seule fin que ce benêt de peuple de Paris, qui, entre nous, n’est point, après tout, essentiellement égorgeur, embourse, selon notre projet, la responsabilité des gentillesses de Lehiron et de ses compères. Aussi, dans un siècle encore on dira : « Ce cannibale de peuple de Paris a égorgé Flesselles, a égorgé les deux hommes du champ de Mars, a voulu assassiner La Fayette, a égorgé des Suisses au 10 août, a égorgé la princesse de Lamballe, etc., etc… » Donc ces antécédents, ce me semble, vous répondent suffisamment de la prodigieuse valeur de cet honnête scélérat. Il possède, non point sur le peuple, mais sur la crapule des plus bas fonds de la grande ville une énorme influence ; je vous réponds donc que demain vous entendrez rugir la bête féroce aux abords de la Convention, et que les cris de : Vive la montagne ! Mort aux girondins ! seront poussés avec un touchant accord.

L’ABBÉ ROUX. — J’adjoindrai, s’il vous plaît, à votre Lehiron, le fameux Varlet, marionnette dont je tiens les fils sans qu’elle s’en doute, et que je fais agir à mon gré. Cet adolescent, honnête au fond