Aller au contenu

Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/327

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de leurs parents, de leurs amis, semant la route des traits de leur gaieté. On saluait le maire en lui disant adieu ! on saluait le coq du clocher du village par une salve de coups de fusil !… Que de sentiments divers dans les cœurs ! Oh ! nobles enfants ! brave jeunesse ! quel généreux sacrifice de ton sang ! Tous les pères étaient là, toutes les mères étaient là… ceux-ci excitant le civisme de leurs enfants, celles-là les embrassant. En vérité, je pleure encore… oui, je pleure en écrivant… car j’ai devant les yeux ces scènes sublimes de dévouement à la patrie, à la république. »

Ô fils de Joël ! comparez l’élan, l’entrain de ces volontaires courant défendre à la frontière la plus belle, la plus sainte des causes, celle de l’indépendance de la patrie menacée ; oui, comparez cet élan civique à l’attitude morne, triste, presque toujours désespérée, de ces recrues des monarchies allant rejoindre à regret leur régiment pour prendre part à des guerres de conquête ou d’asservissement, guerres stupides ou impies, dont le but est ignoré ou déploré par ces malheureux soldats forcés d’y prendre part au nom de l’obéissance passive ! L’un des caractères particuliers de la formation des bataillons de volontaires est aussi la fusion égalitaire qui s’opère de la sorte entre les différentes classes sociales. Soyons équitables et disons-le à l’honneur de la bourgeoisie, elle a fourni beaucoup plus que son contingent de volontaires, parmi lesquels se rencontraient en foule : des commerçants, des artistes, des propriétaires, des gens de lettres, des avocats, de riches rentiers ; tous renonçaient gaiement à leurs habitudes de bien-être pour accomplir leurs devoirs patriotiques, témoin ces fragments de correspondance :

« Tu ne te fais pas d’idée, mon ami, des singularités de notre marche et de nos études (écrivait le citoyen FORÊT). Ah ! qu’il est dur et qu’il est doux d’être volontaire, d’aller à pied chargé comme un chameau pliant sous le faix, couchant sur des lits souvent misérables et se disputant les morceaux avec des gaillards qui souvent ont le poignet ferme. Figure-toi six cents écoliers de bon