Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/120

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vorer, dans la méchante intention de détruire en ta personne une valeur appartenant à notre maîtresse ? Ah ! scélérate, voilà comme tu t’es arrangée ! Ah ! tu t’es méchamment retiré, au détriment de notre honorée maîtresse, les trois quarts de ton prix ! Car maintenant personne ne voudrait un monstre pareil à toi, sinon comme épouvantail pour les enfants !… Ah ! tu as eu l’audace de te défigurer !… une des plus belles esclaves de notre noble maîtresse ! toi que l’on pouvait vendre non-seulement comme bonne esclave de travail, mais comme esclave de beauté de premier choix ! Ah ! double scélérate ! marche devant moi, tu vas être fouaillée comme il convient ; et par Pollux, je vais commander à l’exécuteur de mettre des lanières neuves à son fouet.

Loyse calma d’un regard angélique la rage désespérée que ces injures et ces menaces soulevaient chez Sylvest, et elle répondit tranquillement au gardien :

— Non… tu ne me feras subir aucun mauvais traitement !

— Et qui m’en empêchera, délice des houssines ?

— L’intérêt de ta maîtresse… Je suis mère… En battant la mère, on tuerait l’enfant… Or, c’est une valeur qu’un enfant… ça se vend…

— Tu es mère ? Chanson ! elles sont toujours mères, les effrontées coquines, lorsqu’il s’agit de leur marbrer la peau !  !  ! Du reste, la matrone des esclaves en gésine dira bien si tu mens…

Et se retournant vers Sylvest, toujours maintenu par les deux autres veilleurs :

— Et toi, pilier de prison, que fais-tu ici ? À qui appartiens-tu, enfant chéri des étrivières (J) ?

— Il se nomme Sylvest ; il appartient au seigneur Diavole, noble Romain à Orange, — répondit un des gardiens en lisant cette inscription gravée au collier que l’esclave portait au cou.

— Ah ! tu appartiens au seigneur Diavole ? — reprit le gardien ; — ta livrée annonce que tu es un esclave d’intérieur ?