— Une ressemblance… avec quel cygne ?
— Avec la belle Gauloise… vos amours.
— Lui ?… Vous vous moquez !
— Je ne me moque point… Sur cette tête rasée, figurez-vous des cheveux blonds ; au lieu de cette face brûlée par le soleil, imaginez un teint de lis et de roses.
— En effet, je ne l’avais pas attentivement regardé, cet esclave, — dit Norbiac en examinant Sylvest, — et, s’il est blond, il a comme la belle Gauloise, chose peu commune, les yeux noirs. Oui, plus je le considère, plus je trouve en effet une vague ressemblance…
— Cela vient sans doute de ce qu’il n’est pas tout à fait du même père que sa sœur, — reprit Diavole en éclatant de rire.
Sylvest sentit que s’il avait tenu en ce moment son maître sous son rasoir, il l’eût peut-être égorgé.
— Mais enfin, — reprit Diavole, — le père a été suffisamment représenté, pour que vous reconnaissiez dans ce drôle le frère de la belle Gauloise.
— Son frère !… Cet esclave ?
— Lui et votre belle ont été vendus enfants, il y a environ dix-huit ans de cela, après la bataille de Vannes ; il me contait justement tout à l’heure cette histoire. Est-ce vrai, pendard ?
— C’est la vérité, seigneur, — a répondu Sylvest, croyant rêver, car il ne pouvait concevoir le dessein de son maître.
— Tu es son frère ? — s’écria le Gaulois en s’adressant à Sylvest, — alors tu dois savoir…
Diavole l’interrompit :
— Il a seulement appris hier sa parenté, — se hâta-t-il de dire ; — jusqu’alors il n’avait pas vu la belle Gauloise, et il ignorait qu’elle fût sa sœur. Comprenez-vous maintenant, cher Norbiac, que si les entremetteuses, les riches seigneurs ont vu la porte se fermer à leur nez, elle s’ouvrira devant un frère ?
— Ah ! Diavole… mon ami ! mon généreux ami, vous me sauvez !