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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/146

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— Oh ! très-souvent… C’est une créature qui n’oublie rien…

Et les traits du vieillard prirent une expression de raillerie sinistre.

— Et de mon père ? de ma mère ? ma sœur vous a-t-elle aussi souvent parlé ?…

— Très-souvent, — répondit le vieillard avec la même expression, — très-souvent… C’est la perle des filles et des sœurs !… Il est dommage qu’elle ne soit pas mariée, elle serait aussi la perle des épouses ! Mais que lui veux-tu, à ta sœur ?

— La voir… m’entretenir longuement avec elle.

— Vraiment !… Et qu’est-ce que cette cassette que tu tiens là sous ton bras ?

— C’est de l’or…

— Pour la belle Gauloise ?

— On m’a ordonné de le lui offrir.

— Ton maître, sans doute ? car ta tête rasée et ta livrée annoncent que tu es esclave domestique… Un valet pour frère !… il y a de quoi enorgueillir Siomara… De plus, tu fais l’entremetteur auprès de ta sœur… c’est d’un bon parent…

La fureur monta au front de Sylvest ; mais il se contint et reprit :

— Le hasard m’a offert ce soir le moyen de me rapprocher de ma sœur… je l’emploie…

— Soit… pose cette cassette sur la table… Et comment et quand as-tu su que la belle Gauloise était ta sœur ?

— Peu vous importe !…

— Ce maraud est tout abandon, toute confiance… Ainsi, tu veux voir ta sœur ? sans doute pour lui demander de te racheter des mains de ton maître ? ou pour gueuser auprès d’elle quelque aumône ?

— En cherchant à voir la fille de mon père, je cède au besoin de mon cœur ! — répondit fièrement Sylvest. — Une parcelle de l’or infâme qu’elle gagne pourrait me racheter de la torture et de la mort… que je préférerais la torture et la mort !…

— Entendez-vous ce coquin, avec sa tête rasée et sa souquenille de