Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/151

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sard qui, durant deux nuits de suite, l’une chez Faustine, l’autre en ce dernier lieu, le rendait spectateur invisible de mystères étranges…

Bientôt Siomara sembla sortir en sursaut de son assoupissement, elle tressaillit, se redressa comme si elle eût entendu quelque bruit ou quelque signal, abandonna le lit de repos, se leva et alla regarder un sablier à moitié vide, qui lui rappela sans doute une heure fixée par elle, car elle se hâta de rajuster les nattes de sa coiffure… Alors elle prit sur la table un flacon de forme bizarre, et en versa plusieurs gouttes dans le vase d’airain posé sur un trépied, d’où sortait une lueur bleuâtre ; cette lueur se changea en plusieurs jets de flamme d’un rouge vif ; tant qu’ils durèrent, Siomara exposa au-dessus d’eux une plaque de métal polie… Les jets de flamme rouge éteints, elle examina curieusement les traces noirâtres laissées par le feu sur le poli du métal… L’esclave ne put s’empêcher de se rappeler en frémissant les sortilèges de la hideuse sorcière thessalienne. Mais bientôt Siomara jeta la plaque loin d’elle, frappa dans ses mains en signe de contentement ; sa figure devint rayonnante, et elle courut au coffre de bois de cèdre, placé au-dessous du miroir d’argent bruni… Ainsi posée, elle tournait de nouveau le dos à Sylvest ; elle ouvrit le coffre… en tira une longue robe noire, s’en vêtit, et la serra à sa taille au moyen de la ceinture rouge accrochée près du miroir… À la vue de cette robe noire et de cette ceinture magique, une sueur froide inonda le front de Sylvest ; il voyait sa sœur absolument vêtue comme la sorcière thessalienne introduite chez Faustine… Siomara, le dos toujours tourné, s’étant baissée de nouveau vers le coffre, y prit une sorte de moule à capuchon, dont elle couvrit soigneusement sa tête, et se retourna pour se rapprocher de nouveau du trépied d’airain.

Dieux secourables ! la raison de Sylvest était ferme, car en ce moment il n’est pas devenu fou !… mais le vertige l’a saisi… Non, ce n’était plus Siomara qu’il voyait… c’était la sorcière thessalienne qui, la nuit précédente, avait demandé, chez la grande dame ro-