Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/185

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— Ouvrez, Siomara… ouvrez… le soleil est levé… Un magistrat vient d’entrer au logis avec des soldats pour chercher un esclave caché ici, et qui a fui la maison du seigneur Diavole en s’emparant d’une cassette pleine d’or… Ouvrez, ouvrez…

— Je m’informerai de la demeure de ton maître, — dit Siomara à Sylvest. — Je ne veux plus me séparer de toi, bon et tendre frère ! Je te rachèterai à quelque prix que ce soit… Et, d’ailleurs, Diavole est épris de la belle Gauloise… que pourra-t-il lui refuser ?…

Jamais Sylvest n’avait songé à une pareille honte… être racheté par l’infamie de sa sœur !… Aussi, pour échapper à ce dernier coup, il dit à Siomara, tandis que l’eunuque heurtait toujours à la porte :

— Élevé dans la foi de nos pères, la magie me semble redoutable. Cependant, je te servirais peut-être dans tes sortilèges, si tu me promettais, par ton art magique, de me donner le moyen de tirer de mon maître et de ses pareils une vengeance terrible !…

— Frère… ne nous quittons plus… et, grâce à mes sortilèges, parmi les plus atroces vengeances, tu n’auras que le choix…

— Afin de satisfaire ma haine… il me faut rester quelques jours encore au service de Diavole… J’ai mes projets… Jure-moi par notre affection de ne tenter aucune démarche auprès de mon maître pour racheter ma liberté, avant que je t’aie revue… et bientôt j’en trouverai le moyen… Me promets-tu cela ?

— Je te le jure ! — répondit Siomara radieuse.

Et elle enlaça son frère d’une dernière et tendre étreinte, sans qu’il osât s’en défendre, de peur d’éveiller les soupçons de la magicienne. Celle-ci, s’approchant alors de la porte, toucha sans doute un ressort caché, car elle s’ouvrit aussitôt, et, avant que Sylvest ait eu le temps de se retourner, Siomara avait disparu, ou par une invisible issue, ou par un nouvel enchantement.

— Voilà ce misérable esclave ! — s’écria l’eunuque entrant avec le magistrat, et paraissant triompher avec une joie cruelle en expulsant Sylvest de la maison…