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LES MYSTÈRES DU PEUPLE.

taine, la couvrait de son ombre pendant le jour. On pénétrait ensuite dans un vestibule rempli de serviteurs, et de là dans la salle du festin, boisée de sandal incrusté d’ivoire.

Autour de la table étaient rangés des lits de bois de cèdre recouverts de riches draperies, où les convives s’asseyaient pour manger… Selon l’usage du pays, les femmes qui assistaient au repas avaient amené une de leurs esclaves qui se tenait debout derrière elles durant tout le festin. Ce fut ainsi que Geneviève, femme de Fergan, assista aux scènes qu’elle va raconter, ayant accompagné sa maîtresse Aurélie chez le seigneur Ponce-Pilate.

La société était choisie : on remarquait parmi les gens les plus considérables le seigneur Baruch, sénateur et docteur de la loi ; le seigneur Chusa, intendant de la maison d’Hérode, tétarque ou prince de Judée, sous la protection de Rome ; le seigneur Grémion, nouvellement arrivé de la Gaule romaine comme tribun du trésor en Judée ; le seigneur Jonas, un des plus riches banquiers de Jérusalem, et enfin le seigneur Caïphe, un des princes de l’Église des Hébreux.

Au nombre des femmes qui assistaient à ce festin, il y avait Lucrèce, épouse de Ponce-Pilate ; Aurélie, épouse de Grémion, et Jeane, épouse de Chusa[1].

Les deux plus jolies femmes de l’assemblée qui soupait ce soir-là chez Ponce-Pilate étaient Jeane et Aurélie. Jeane avait cette beauté particulière aux Orientales : de grands yeux noirs à la fois doux et vifs et des dents d’une blancheur que son teint brun rendait plus éblouissante encore. Son turban, de précieuse étoffe tyrienne de couleur pourpre enroulée d’une grosse chaîne d’or dont les deux bouts retombaient de chaque côté sur ses épaules[2], encadrait son front à demi-caché par deux grosses tresses de cheveux noirs. Elle était vêtue d’une longue robe blanche laissant nus ses bras chargés de bracelets

  1. Jeane, femme de Chusa, intendant d’Hérode, Suzanne et plusieurs autres, assistaient Jésus de leurs biens. (Évangile selon saint Luc, chap. VIII, v 3.)
  2. Genèse, XXIV, v. 47.