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LES MYSTÈRES DU PEUPLE.

per, chez le seigneur Ponce-Pilate, debout derrière vous, je ne perdais pas une parole… Quel acharnement contre ce pauvre jeune homme !

— Que veux-tu, Geneviève ? — répondit Aurélie en souriant, — c’est un peu sa faute.

— Vous aussi, vous l’accusez ?

— Non ; mais enfin il attaque les banquiers, les docteurs de la loi, les médecins, les prêtres, enfin tous ces hypocrites qui, m’a dit Jeane, appartiennent à l’opinion pharisienne… Il n’en faut pas davantage pour se perdre à jamais.

— C’est du courage, au moins, de dire leurs vérités aux méchantes gens… et ce jeune homme de Nazareth est aussi bon que courageux, selon Jeane, votre amie… Elle est riche, considérée ; elle n’est pas esclave comme moi ; il ne prêche donc pas en sa faveur, à elle… et pourtant, voyez comme elle l’admire !

— Cette admiration d’une douce et charmante femme témoigne, il est vrai, en faveur de ce jeune homme ; car, Jeane, avec son noble cœur, serait incapable d’admirer un méchant… Quelle aimable amie le hasard m’a donnée en elle ! Je ne sais rien de plus tendre que son regard, de plus pénétrant que sa voix… Elle dit que lorsque ce Nazaréen parle aux souffrants, aux pauvres et aux petits enfants, sa figure devient divine… Je ne sais, mais, ce qui est certain, c’est que la figure de Jeane devient céleste lorsqu’elle parle de lui.

— Ne serait-ce pas elle qui s’approche de ce côté, ma chère maîtresse ?… J’entends dans l’ombre un pas léger…

— Ce doit être elle.

En effet, Jeane, aussi costumée en jeune garçon, eut bientôt rejoint Aurélie et son esclave…

— Vous m’attendez peut-être depuis longtemps, Aurélie ? — dit la jeune femme ; — mais je n’ai pu sortir en secret de ma maison avant cette heure.

— Jeane, je ne me sens pas très-rassurée… je suis peut-être en-