Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

cher, comme les autres assistants, de quel côté étaient parties ces paroles.

Le tumulte allait croissant, lorsque le jeune maître de Nazareth fit signe qu’il voulait parler ; la tempête s’apaisa comme par enchantement, et, répondant à ce reproche d’être trop indulgent pour les pécheurs, Jésus dit avec un accent de sévère douceur :

« — Qui d’entre vous, possédant cent brebis, et en ayant perdu une, ne laisse dans le désert les quatre-vingt-dix-neuf autres pour s’en aller chercher celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il la trouve ?

» Lorsqu’il l’a retrouvée, il la met avec joie sur ses épaules.

» Et, étant retourné en sa maison, il assemble ses amis et ses voisins, et leur dit : — Réjouissez-vous avec moi, parce que j’ai retrouvé ma brebis qui était perdue…

» Et je vous dis, — ajouta le fils de Marie d’une voix remplie d’une grave et tendre autorité, — je vous dis, moi, qu’il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui fait pénitence que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de pénitence[1]. »

Ces touchantes paroles du fils de Marie firent une vive impression sur la foule ; elle applaudit du geste et de la parole.

— Réponds à cela, mon agneau blanc ! mon lis sans tache ! — reprit Banaïas en s’adressant à l’interrupteur invisible du Nazaréen. — Si tu n’es pas de l’avis de mon ami, viens ici soutenir tes paroles.

— Le beau mérite, comme le dit Jésus, — reprit un autre, — le beau mérite, à celui qui n’a ni faim ni soif, de ne se montrer ni glouton ni ivrogne !

— Facile est la vertu… à qui rien ne manque, — dit la courtisane Oliba. — La faim et l’abandon perdent plus de femmes que la débauche.

Soudain, un certain tumulte se fit parmi la foule dont la taverne était remplie, et l’on entendit prononcer le nom de Madeleine.

  1. Évangile selon saint Luc, ch. XV, v. 4-7.