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Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/71

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alors du pied son esclave couché à terre, s’empara de ma fille, la saisit entre ses genoux, maîtrisa facilement les efforts qu’elle faisait afin de lui échapper en poussant des cris perçants, rompit violemment les cordons qui attachaient la petite robe de mon enfant, et la mit à moitié nue pour examiner sa poitrine et ses épaules, tandis que le marchand te contenait, mon fils.

Et moi… le père des deux victimes… moi qui, chargé de chaînes voyais cela… que faisais-je ?… Lis toujours, mon fils… lis toujours, et attend…

À ce crime du seigneur Trymalcion… le plus exécrable des crimes !… outrager la chasteté d’un enfant !… les trois Gauloises enchaînées et la matrone furent un effort désespéré, mais vain, pour rompre leurs fers, et se mirent à pousser des imprécations et des gémissements…

Le seigneur Trymalcion acheva paisiblement son horrible examen, dit quelques mots au marchand, et aussitôt un gardien rajusta la robe de mon enfant, plus morte que vive, l’enveloppa dans un long voile qu’il lia autour d’elle, et, prenant entre ses bras ce léger fardeau, il se tint prêt à suivre le vieillard, qui, pour payer le marchand, prenait de l’or dans sa bourse… À ce moment de désespoir suprême… toi et ta sœur… pauvres enfants égarés par la terreur ! vous avez crié comme si vous croyiez pouvoir être entendus et secourus… vous avez crié : Ma mère !… mon père !…

Jusqu’à ce moment, vois-tu, mon fils, moi, j’avais assisté à cette scène, haletant, presque fou de douleur et de rage, à mesure que, luttant de toute la puissance de mon cœur paternel contre les sortilèges du maquignon, j’en triomphais peu à peu… Mais, à ces cris poussés par toi et par ta sœur : Ma mère !… mon père !… le charme se rompit tout-à-fait… je retrouvai toute ma raison, tout mon courage ; votre vue me donna une telle secousse, un tel élan de fureur, que, ne pouvant briser mes fers, je me suis dressé, et, les mains toujours enchaînées derrière le dos, les jambes toujours chargées de lourdes