Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 4.djvu/233

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— Nous ne pouvons bouger, mon père… la torture nous a brisés !

— Oh ! des forces ! des forces !… Voir là mes deux fils !… il faut les sauver pourtant…

— Mon père, tu n’ébranleras jamais cette grille !… donne-nous ta main à travers les barreaux, que nous la baisions, et ne songe plus qu’à fuir… du moins nous t’aurons revu…

— Quelqu’un accourt !

— Un ours !

— À moi, Veneur ! à moi, mon hardi garçon !… délivrons mes fils !…

— Ma belle évêchesse, es-tu là ? voici ma tête à bas… me reconnais-tu ?

— Mon Vagre, c’est toi ! oh ! tu m’aimes !…

— Un baiser à travers la grille ? il doublera mes forces, mon adorée.

— Tiens… tiens… et sauve cette enfant ! sauve-nous !…

— Tes lèvres ont pressé les miennes… Maintenant, mon évêchesse, je porterais le monde sur mes épaules… À nous deux, Karadeuk… renversons cette grille !

— Veneur, vous êtes tous deux seuls ici, toi et mon père ?

— Tous deux seuls, Ronan…

Et joignant ses efforts à ceux du vieux Vagre pour renverser la grille, le veneur ajouta :

— J’ai mis le feu aux quatre coins du burg : étables, écuries, granges, tout flambe à plaisir !… La maison du comte, pleine de Franks qui s’égorgent, et bâtie en charpente, commence à brûler au milieu de cet incendie, comme un fagot dans un four ardent… Malédiction ! impossible d’ébranler cette grille !… Il faudrait des leviers…

— Sauve-toi, mon Vagre ! je mourrai avec la douce pensée de ton amour… Oh ! dites, Loysik, d’un pareil amour ai-je encore à rougir ?