Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 4.djvu/307

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les moines et les habitants de la vallée, nous estimons qu’en cas de rébellion de leur part aux ordres de notre saint évêque de Châlons, vingt guerriers… c’est fort peu.

Gondowald toisa le prêtre d’un regard dédaigneux, et ne répondit même pas à l’observation.

— Je ne partage pas vos craintes, mes chers fils, et j’ai de bonnes raisons pour cela, — reprit l’archidiacre d’un air hautain. — Nous voici tous embarqués… maintenant, au large le bac !

Bientôt débarquèrent sur la rive de la vallée, l’archidiacre, Gondowald, chambellan de Brunehaut, et les vingt guerriers de la reine, casqués, cuirassés, armés de lances et d’épées ; ils portaient en sautoir leurs boucliers peints et dorés.

— Y a-t-il un long trajet d’ici au monastère ? — demanda l’archidiacre en posant le pied sur le rivage.

— Non, mon père… il y a tout au plus pour une demi-heure de route.

— Marchez devant, mes chers fils… nous vous suivons.

— Ah ! mon père ! les impies de cette communauté ignorent à cette heure que le châtiment du ciel est suspendu sur leur tête !

— Hâtez le pas, mes fils… bientôt justice sera faite…

— Hermanfred, — dit le chef des guerriers en se retournant vers l’un des hommes de sa troupe, — as-tu le trousseau de cordes et les menottes de fer ?

— Oui, seigneur Gondowald.




Au monastère, le festin continuait : partout régnait une douce cordialité. À la table où se trouvaient Loysik, Ronan, le Veneur et leur famille, l’entretien continuait, vif, animé ; l’on parlait en ce moment des terribles choses qui se passaient, dit-on, dans le sombre palais de la reine Brunehaut. Les heureux habitants de la vallée écoutaient ces sinistres récits avec cette curiosité avide, inquiète et souvent